Développement et financement de la formation ouverte et à distance dans les PME et TPE

Vendredi 24 Septembre 2004

Compte rendu du Petit déjeuner thématique du FFFOD du 24 septembre 2004

Ce texte est téléchargeable à http://www.fffod.org/fr/doc/PD/CR240904PmeTpe.doc

Développement et financement de la formation ouverte et à distance dans les PME et TPE

1. Bilan de la recherche-action FORE TPE-PME 2001-2003

Arnaud COULON, consultant chez Algora, présente le bilan de la recherche-action FORE TPE-PME 2001-2003. Initié en 2001 par la DGEFP sous l'impulsion des partenaires sociaux de la commission FORE, le programme Recherche-action FORE a permis à onze projets d’aboutir (sur les quinze initialement prévus). Deux d'entre eux étaient déployés au plan national, les autres s'inscrivaient dans neuf régions différentes. Tous ces projets intégraient une dimension partenariale associant quatre catégories d'acteurs institutionnels : organismes de branches, organismes consulaires, OPCA, organismes de formation et de conseil.

A travers l’analyse des projets, ce bilan vise à définir les conditions de faisabilité de formation ouverte et à distance (foad) dans le contexte des TPE-PME et à déterminer les conditions minimales de déploiement de ces expérimentations.

ALGORA propose sur son site soit un résumé du bilan de la recherche action FORE TPE-PME 2001-2003 soit le téléchargement du bilan complet :
http://ressources.algora.org/reperes/rebonds/dossiers/foretpepme.asp

Arnaud COULON présente ses constats et préconisations en suivant quatre étapes de la démarche Recherche action FORE TPE-PME
(présentation ppt : http://www.fffod.org/fr/doc/pd/BilanFORETpePme240904.ppt) :
- étude préalable,
- conception,
- expérimentation,
- évaluation, promotion, modalités de généralisation.

Étude de faisabilité: quelle entrée choisir…?
Constats :
• l’analyse préalable : une entrée souvent « traditionnelle », des approches parfois peu « problématisantes »
• la mobilisation des entreprises et partenaires : des intervenants multiples, un ensemblier, la nécessaire médiation par les « pairs » pour individualiser le rapport à la TPE
• la limite des moyens disponibles en inadéquation avec les enjeux
Préconisations :
• l’approche segmentée (« Granularité » de l’analyse stratégique et de l’étude de faisabilité)
• des moyens à la hauteur des ambitions

Conception
Constats :
• une entrée par l’offre sur des domaines transverses
• l’adaptation de l’offre générique et la co-production (entrée par la demande)
• des partenariats parfois fragiles, à élargir
• une ingénierie impactée par la technologie (logique produits versus services)
• aucune modélisation économique
Préconisations :
• favoriser les logiques de co-production, une ingénierie « collaborative »
• prévoir le « Business Plan » du dispositif à l’échelle d’un territoire, d’une branche…
• augmenter la lisibilité de l’offre

Expérimentation
Constats :
• contenus de formation peu liés aux situations de travail
• la phase de préparation préformation : passage obligé
• une gestion des temps sous tension relative
• un accompagnement à adapter en fonction du statut (chef d ’entreprise ou salarié)
• prise de contrôle libre ou contrainte…?
• l’équipement et les infrastructures : les problèmes de mise à niveau, de maintenance et de dimensionnement
• encore des problèmes d’imputabilité
• la validation : point noir
Préconisations :
• lier formation et situation problème = valeur ajoutée
• négocier le degré d’ouverture et apprécier les impacts organisationnels du côté prestataire
• adapter les contenus tant sur le champ transverse que métiers
• réduire le flou autour des parcours, assurer une véritable guidance
• renforcer l’individualisation
• s’assurer du financement !

Evaluation, promotion, modalités de généralisation
Constats :
• peu de lien entre l’évaluation et le transfert : analyse des résultats versus analyse des processus
• les conditions de transfert n’ont pas été complètement évaluées
• les principales difficultés liées à un contexte événementiel à la marge des organisations
Préconisations :
• ne pas confondre pilote et modèle, instituer le dispositif donc le relier à la stratégie d’entreprise (pour l’ensemble des partenaires), de branche, de territoire
• étendre et ne pas forcément déployer

Arnaud COULON indique que le déploiement de ces expérimentations ne peut être l’affaire des seuls porteurs. Il faut aussi pour déployer une volonté politique marquée, une définition claire d’un cadre stratégique (repositionnement des acteurs) et une action de marketing et de promotion tout azimut.

Il conclut sur le rôle indispensable des OPCA pour développer les foad auprès des TPE-PME et propose des actions rapides et faciles à entreprendre :
• sortir du mode projet et du mode dérogatoire
• former les conseillers
• sensibiliser les partenaires sociaux
• penser stratégie territoriale et convergence
• réviser les procédures de traitement des dossiers
• repenser les modes d’intervention et les priorités (les TPE)
• jouer le rôle de catalyseur, d’ensemblier
• aider à repenser l’ingénierie financière des projets.


2. Résultats de l’étude FFFOD sur le financement des FOAD par les OPCA

Bruno FAJNZILBERG, directeur de Savoirs pour tous, présente les résultats de l’étude du FFFOD sur le financement des FOAD par les OPCA : les constats et les pistes de développement des FOAD par les OPCA.

La présentation ppt : http://www.fffod.org/fr/doc/pd/OPCAetFOAD240904.ppt

Cette étude a été réalisée dans le cadre du projet Européen S2NET dont l’objectif est, entre autre, d’étudier le développement de l’utilisation de la Formation Ouverte A Distance dans les différents Secteurs de l’économie en Europe.

Dans un premier temps, nous avons d’abord interrogé les entreprises et comme le taux de réponse était très faible (- de 15 réponses), nous avons décidé de créer un groupe de travail avec les OPCA pour mesurer le développement du financement des dispositifs de FOAD. Les objectifs étaient de :
• faire un constat de la situation
• identifier les bonnes pratiques mises en œuvre
• faire ressortir les conditions du succès
• identifier les pièges à éviter
• faire des préconisations de mise en œuvre

Nous tenons à remercier les OPCA suivants qui ont accepté de collaborer (qui représentent ensemble plus d’un million d’entreprises et plus de 10 millions de salariés) :
• AFDAS : OPCA des secteurs Culturel, Communication et Loisir
• AGEFAFORIA : OPCA du secteur agroalimentaire
• AGEFOS PME : OPCA interprofessionnel
• ANFA : OPCA du secteur du commerce et de la réparation automobile
• FAFIEC : OPCA des secteurs SSII, Sociétés d’ingénierie, Bureaux d’étude, Cabinets de conseils et Organisateurs de foires et salons
• FAFIH : OPCA du secteur de l’Industrie Hôtelière et de la restauration
• FAF SAB : OPCA du secteur des salariés de l’Artisanat du bâtiment et des travaux publics (entreprises de – de 10 salariés).
• FAF SEA : OPCA du secteur des salariés des exploitations et des entreprises agricoles.
• FAF TT : OPCA du secteur des entreprises du Travail Temporaire
Et l’UIMM : Union des Industries des Métiers de la Métallurgie

Les principaux constats :

• les OPCA ont mis à jour les procédures pour les demandes de foad,
• très peu de foad sont prises en charge par les OPCA : moins de 0,5 % des salariés formés ont suivi des foad,
• très peu de grandes entreprises qui annoncent avoir formé plusieurs milliers de collaborateurs en foad ont sollicité leur OPCA pour réaliser ces opérations,
• quand elles sont passées par leur OPCA, l’écart entre le nombre de financements accordés et le nombre de formations effectivement réalisées est très important.

L’écart entre les chiffres annoncés par les entreprises, les éditeurs de contenus et ceux indiqués par les OPCA est gigantesque. Qu’en est-il en réalité ?

Pourquoi cette faiblesse de la demande de financement ?

• manque d’adéquation de la définition de la foad avec les pratiques d’entreprise
• lourdeur administrative des dossiers OPCA
• faiblesse de l’offre formation « métier » et manque de mutualisation
• commercialisation de cette offre par les éditeurs dirigée exclusivement vers les grands groupes susceptibles d’acheter en masse
• faiblesse de l’investissement des opérateurs formation agissant traditionnellement à destination des PME
• les déboires ou échecs retentissants rencontrés par certains opérateurs de formation ont très largement contribué à donner une impression de risques non maîtrisés sur la FOAD

Des pistes pour développer l’usage de la FOAD et sa prise en charge par les OPCA

Nous identifions trois facteurs clés de développement des foad :
• la capacité des OPCA à financer de telles formations,
• la communication,
• l’existence d’une offre de formation « métier » disponible.

Deux exemples actuels réussis peuvent être suivis :
• la prise en charge conjointe de la branche professionnelle et de l’OPCA du financement et du développement de l’offre de formation,
• l’incitation des entreprises à mettre en commun le développement de contenus.

Autres pistes :
• Aider les organismes de formation à faire évoluer une partie de leurs formations présentielles vers de la foad,
• Faciliter l’accès aux projets Européen par ma mise en œuvre de projets communs OF / OPCA / Branche
• Améliorer les relations entre OPCA et éditeurs de contenus de FOAD :

Les éditeurs n’étant pas des organismes de formation, il leur est difficile de s’intégrer dans la relation OPCA/entreprises. Cette absence de relation organise le développement d’un marché d’achat de ressources non pris en compte au titre de la formation et détourne une partie des dépenses « formations » hors du marché officiel. Cette exclusion amène deux risques :
- L’absence de politique d’investissement pour développer du contenu de formation en français,
- La volonté de certains de faire reconnaître l’autoformation « e-learning » comme formation professionnelle.


3. Table ronde - FOAD et OPCA : opportunités et obstacles animée par Claude LÉPINEUX, responsable du développement d’Algora

Les représentants des OPCA qui suivent interviennent et répondent aux questions de Claude Lépineux et des participants :
Jean-Pierre HERVELEU, Chef du Service Méthodes et Formations, ANFA
Nicolas GODARD, Chef du Service R&D, GNFA
Isabelle GARNON, Chargée de mission, FAF SAB
Patricia CAILLOT, Consultante, FAFSEA
Tania LELOUP, Chargée de mission, FAF TT
Pierre LAURENT, Responsable de la cellule marketing, AGEFOS PME

Claude LÉPINEUX (ALGORA) : Comment expliquer la dissonance entre le discours officiel des OPCA et la réalité des financements ?

Pierre LAURENT (AGEFOS PME) : Les OPCA apparaissent généralement assez conservateurs et sont toujours soucieux de l’effectivité de la formation. La circulaire de juillet 2001 a certes fixé les cadres de l’éligibilité des foad mais elle reste assez restrictive, ce qui induit une gestion papier complexe et lourde. Nous avançons lentement et nous allons doucement vers une dématérialisation. Les AGEFOS travaillent actuellement à une certification électronique des foad.

Hubert BONAL, (CCIP) : Quand on parle des éditeurs de foad, il faut faire la différence, comme nous le faisons pour le cinéma, entre les activités de réalisation, de production et de diffusion. Les métiers sont différents et les implications financières de ces activités aussi. La maturité du marché sera effective quand on identifiera bien les différents métiers de la foad.

Marie-France MOMMEJA (ARCTIA) : En tant qu’organisme de formation, ARCTIA a été amené à créer une ligne complète de contenus (formation informatique). Après 5 ans d’ « évangélisation » pour les foad, les résultats restent maigres. A quelle porte frapper aujourd'hui ?

Bruno FAJNZILBERG (Savoirs pour tous) : Il faut aller voir les OPCA et continuer ce travail pour les convaincre de l'intérêt des foad. Les centres de diffusion locaux me semblent être le maillon manquant de la chaîne décrite par Hubert BONAL.

Jean-Pierre HERVELEU (ANFA) : Le contexte des TPE est assez défavorable à la foad. La formation est souvent vécue comme une contrainte au fonctionnement quotidien de l’entreprise où chaque salarié est « indispensable » par la spécialité qui lui est propre. La formation sur le poste de travail est difficile à mettre en place par le manque d’équipement et de contenus, les professionnels de l'automobile aspirant à des formations sur le métier, concrètes et très techniques. Ce qui amène une situation où sur les 50 000 formations prises en charge par an par l’OPCA, il y a seulement une dizaine de demandes de foad. Et ceci s’explique aussi par le fait que les grandes entreprises automobiles forment un réseau très fermé où la confidentialité prime. Si elles mettent en œuvre des foad, celles-ci sont exclusivement réservées à leur réseau.

Bruno FAJNZILBERG (Savoirs pour tous) : Il faut noter aussi le problème pour beaucoup d’OPCA d’identification des foad. Des OPCA prennent en charge des foad qui ne sont pas identifiées comme telles.

Corinne RUDELLE (INSUP) : Les directions des OPCA semblent ouvertes aux foad mais en région, sur le terrain, nous avons affaire à des conseillers OPCA qui, dès qu’il est question de foad, deviennent méfiants et exigent nombre de preuves de l’effectivité de la formation.

Pierre LAURENT (AGEFOS PME) : Le discours des AGEFOS reste très modeste et nous sommes conscients de la réalité. On avance lentement et concrètement. Aujourd’hui les OPCA prennent en charge les foad en tant que dispositifs pédagogiques mais pas les produits des éditeurs.

Christine CLOPEAU (FAFSEA) : Le maître mot de la réforme de la formation professionnelle est l’individualisation c'est-à-dire une formation juste et à temps. Les foad répondent pleinement à ce souci d’individualisation et, dans ce nouveau contexte, sont promises à un bel avenir.

Patricia CAILLOT (FAFSEA) : Le FAFSEA reste modeste. Nous avons mis en place des procédures pour les foad. Nous formons nos salariés en interne. L’OPCA a participé au projet FORE dans le secteur forestier et le projet est maintenant en phase d’extension. Mais ce sont les entreprises qui choisissent les formations. Ce sont elles qui décident.

Tania LELOUP (FAF TT) : Nous avons aussi des procédures qui permettent le financement des foad. Concrètement, nous mettons en place des formations de tuteurs foad. Nous impulsons mais, au final, la décision revient aux entreprises.

Jean-Pierre HERVELEU (ANFA) : Pour les conseillers de l’OPCA, ce qui achoppe c’est le mot « ouverte » dans « formation ouverte et à distance ». Il y a là un problème de culture des TPE que rencontrent nos conseillers.

Nicolas GODARD (GNFA) : Nous avons mis en place un projet de mise à disposition de module mixte de formation de 573 heures avec 15 % de foad avec un tutorat important. Ce projet fonctionne bien (55 inscrits aujourd’hui) et correspond bien à la demande des entreprises.

Isabelle GARNON (FAF SAB) : La foad, au contraire de la FAD qui est bien identifiée, apparaît encore comme expérimentale et c’est à titre dérogatoire que le FAF SAB finance les foad. Nous avons participé à 3 projets de foad. Nous avons très peu de demandes des TPE. Nos services de proximité sont plutôt réticents, il est vrai, et nos administrateurs sont peu enthousiastes.

Arnaud COULON (ALGORA) : S’il est incontestable que la décision revient aux entreprises, le rôle des OPCA dans l’information et l’incitation à la foad est primordial. Les salariés des TPE PME représentent en France 50 % des actifs. Pour faire avancer les choses et passer de l’expérimentation des foad à la pratique, il faut repérer les segments d’entreprises et créer des structures de convergence sur le territoire.

Philippe ARNOLD (Groupe ADHARA) : Alors que le tutorat est essentiel dans les dispositifs de foad, son coût est souvent mal apprécié et mal financé par les OPCA.

Claude LEPINEUX (ALGORA) : Pourquoi le tutorat pose-t-il problème ?

Myriam PUYRAVAU (FONGECIF Ile-de-France) : Il est évidemment plus difficile et plus coûteux de répondre à une demande individuelle. On doit faire une différence entre l’autoformation et la foad qui exige des réponses individualisées. Une solution serait de multiplier les lieux de diffusion des foad.

Bruno FAJNZILBERG (Savoirs pour tous) : En sous évaluant l’accompagnement, on répète les erreurs passées sur les investissements des foad. Pour développer les foad, il faudrait mutualiser les investissements au niveau d’organismes nationaux comme les branches professionnelles et optimiser les circuits de distribution.

Claude LÉPINEUX (ALGORA) : La CEGOS travaille-t-elle avec les OPCA sur des foad ?

Monique HUARD (CEGOS) : Les dossiers OPCA des financements de foad sont extrêmement lourds voire impossibles à gérer. Les exigences en matière de contrôle de l’effectivité de la formation sont très excessives. On a déjà exigé une feuille d’émargement toutes les 10 h et même toutes les heures pour une foad. Ceci nous a entraîné, pour simplifier la gestion administrative des dossiers, à facturer parfois la distance directement aux clients. Dans ce contexte on est encore très loin de la dématérialisation.

Pierre LAURENT (AGEFOS): Cette situation n’est pas raisonnable. Elle est caricaturale. Il faut, quand il s’agit des AGEFOS, me faire remonter ces informations. Les AGEFOS comme beaucoup d’OPCA ne savent pas reconnaître et tracer les foad d’où des informations parcellaires et incomplètes. Des améliorations du système d’information sont prévues. Mais la solution à ces problèmes est un accompagnement de l’offre en local.

Patricia CAILLOT (FAFSEA) : Nous avons un expérience, modeste, de la mutualisation en matière de foad avec, par exemple, un réseau local de CFPPA. Si cette expérience est probante et encourageante, sa construction est longue et laborieuse.

Claude LEPINEUX conclut en invitant les OPCA, les prestataires et organismes de formation, et tous les participants à ce petit déjeuner thématique à venir confronter leurs pratiques et débattre de « Qualité et Développement » avec les différents acteurs du secteur aux Cinquièmes Rencontres du FFFOD, au Conseil Régional de Lorraine à Metz, les 3, 4 et 5 novembre 2004.